mercredi 25 mai 2011

L’INSTANCE PERMANENTE DÉNONCE « LA MARCHANDISATION ET LA PRIVATISATION » DE L’EAU

24/05/2011
Conseil économique et social
DH/5061

Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Instance permanente sur les questions autochtones
Dixième session
11e séance - matin

L’INSTANCE PERMANENTE DÉNONCE « LA MARCHANDISATION ET LA PRIVATISATION » DE L’EAU ET RAPPELLE LE DROIT DES AUTOCHTONES À PARTICIPER À LA GESTION DE CETTE RESSOURCE

« La marchandisation et la privatisation » de l’eau, à laquelle on assiste dans plusieurs pays où vivent les « Premières Nations », ont été vivement dénoncées aujourd’hui à l’Instance permanente pour les questions autochtones qui a tenu un débat sur le thème « Le droit à l’eau et les peuples autochtones ».  En présence de la Rapporteure spéciale chargée de ces questions, les intervenants ont rappelé le droit des autochtones à participer à la gestion de cette ressource.

L’exclusion des peuples autochtones de la gestion de l’eau a été qualifiée de violation flagrante de la Déclaration sur les droits de ces peuples qui dit à l’alinéa 2 de son article 8: « Les États mettent en place des mécanismes de prévention et de réparation efficaces visant tout acte ayant pour but ou pour effet de déposséder les peuples autochtones de leurs terres, territoires ou ressources ». 

Pour les intervenants, cette disposition est tout autant violée que le principe, consacré par la même Déclaration, du consentement préalable, libre et éclairé, sans parler de la « relation spirituelle » qu’entretiennent les peuples autochtones avec l’eau.  Le représentant de la Suède a rappelé que dans sa résolution du 28 juillet 2010, l’Assemblée générale a reconnu le droit à une eau potable salubre et propre comme un droit fondamental, essentiel au plein exercice du droit à la vie et de tous les droits de l’homme. 

Comment assurer son respect?  La représentante de « Organisation Tidawt », du Niger, a relevé des contradictions entre le droit coutumier et le droit positif.  Elle a recommandé un état des lieux des pratiques de gestion de l’eau par les autochtones. 

Il faut une règlementation plus stricte, a plaidé un membre de l’Instance permanente, avant qu’un membre du Parlement autochtone de l’Amérique, n’indique qu’au Venezuela, l’État a l’obligation juridique de veiller à la préservation de l’eau et que des lois garantissent une consultation préalable des communautés autochtones.  Le « droit souverain » de chaque État de réguler l’accès à l’eau a été invoqué par le représentant de Cuba.

Pour appliquer ce « droit souverain », plusieurs idées ont été lancées.  L’élaboration de codes de gestion de l’eau, en consultation avec les populations autochtones a été présentée comme la solution, et dans ce cadre, « aucun pouvoir ne devrait être cédé au secteur privé ». 

Le représentant de la Bolivie est allé plus loin.  Il a prôné l’instauration d’un impôt sur les transactions financières pour créer un fonds de promotion de l’accès à l’eau.  En la matière, l’établissement d’indicateurs d’accès à l’eau dans les communautés autochtones a été préconisé, ainsi que la création d’un réseau multidisciplinaire de connaissances qui intègre les préoccupations et les savoir-faire autochtones.

Ces questions devraient être débattues plus avant, en 2012, à la Conférence sur l’environnement et le développement « Rio+20 » et en 2014, à la Conférence mondiale sur les peuples autochtones.

L’Instance permanente poursuivra ses travaux demain, mercredi 25 mai, à partir de 10 heures.


DÉBAT SUR LE DROIT À L’EAU ET LES PEUPLES AUTOCHTONES

Présentant les grandes lignes du débat de ce matin, M. BERTIE XAVIER, membre de l’Instance permanente, a rappelé que les communautés autochtones étaient souvent les premières touchées par les violations du droit à l’eau potable, qui est un droit de l’homme fondamental incontestable.  Aussi, a-t-il énuméré un certain nombre de priorités en matière de gestion des ressources aquifères, au premier chef une règlementation plus stricte des pratiques en vigueur dans l’industrie extractive.

M. Xavier a plaidé pour que l’on prévienne la contamination des sources et des écosystèmes, en mettant là aussi au point des normes et des directives particulièrement rigoureuses.  Il a enfin suggéré d’associer les communautés autochtones locales à la surveillance des réserves d’eau et de veiller à ce que les projets de développement en cours ne compromettent pas l’accès à l’eau de ces populations.

Mme CATARINA DE ALBUQURQUE, Rapporteure spéciale sur les droits de l’homme relatifs à l’accès à l’eau et à l’assainissement, a fait part de la relation soutenue qu’elle entretient avec les organisations autochtones.  Près d’un milliard de personnes dans le monde n’ont pas accès à l’eau et environ 2,5 milliards n’ont pas accès à l’assainissement », a rappelé la Rapporteure spéciale, en déplorant le fait que « ce sont toujours les pauvres, les plus démunis, les plus faibles, les minoritaires et les autochtones qui sont le plus touchés ».

Cette situation dramatique s’explique à la fois par l’inaction des gouvernements et par les politiques inadaptées et injustes de certains États, a dit Mme Albuqurque.  Elle a cité l’exemple de l’Amérique du Sud où les autorités mettent en place des programmes à caractère général et refusent d’adopter des stratégies ciblées.

La construction de barrages hydrauliques a aussi des répercussions dévastatrices sur le cadre de vie des peuples autochtones, a-t-elle dit.  L’identité et les traditions culturelles autochtones risquent aussi d’être perdues du fait de la perte de cours d’eau sacrés, a ajouté Mme Albuqurque.

Il faut, a-t-elle estimé, faire pression sur les gouvernements pour qu’ils respectent les droits des peuples autochtones.  Le droit à l’eau et à l’assainissement fait partie des droits de l’homme, a-t-elle rappelé.  Déterminée à rendre effectif le respect de ce droit, elle a appelé l’Instance permanente à travailler de concert au sein du cadre des Nations Unies pour défendre et promouvoir le droit à l’eau. 

Le droit à l’eau est-il autonome ou découle-t-il d’autres droits, a demandé Mme AICHA CHEIKH SALAH, Organisation Tidawt (Niger), qui a, d’emblée, fait une différence entre ce droit et la propriété.  Pour les peuples touaregs et les Peuls, le point d’eau occupe un rôle tout à fait central dans les stratégies de pâturages et les déplacements qui, contrairement aux apparences, ne se font jamais au hasard.  Ces stratégies et déplacements sont le fruit de décisions prises en fonction de paramètres liés à la disponibilité d’espèces herbacées ou arbustives appétées, hydrauliques, sanitaires ou sociaux.

En matière d’eau, la situation des populations autochtones du Sahara est « inacceptable », a déclaré Mme Salah.  L’eau douce, dont la quantité est déjà limitée sur leurs terres, est aujourd’hui menacée par l’exploitation minière, a-t-elle dénoncé.  Or, a précisé la représentante, la gestion de l’eau est régie par différentes pratiques juridiques entre lesquelles des convergences, mais aussi des contradictions, peuvent apparaître, en particulier entre le droit coutumier et le droit positif. 

Traditionnellement, les pasteurs ont des droits sur une portion de l’espace que l’oratrice a appelé, « terroir d’attache ».  Selon elle, si la propriété privée d’un puits peut exister, elle reste cependant limitée car la vente, par exemple, ne peut avoir lieu qu’avec l’assentiment de tout le groupe.  Le droit positif, lui, est très complexe et souvent difficile à appréhender pour les populations autochtones qui sont pour la plupart analphabètes et qui préfèrent s’en tenir aux interprétations orales.

Mme Salah a recommandé un état des lieux des pratiques de gestion de l’eau par les autochtones.  Ces pratiques, a-t-elle insisté, doivent être inscrites dans le droit coutumier.  Elle a, en outre, préconisé la gratuité des puits, conformément à la coutume des nomades, et le développement de systèmes et techniques de rétention d’eau.  Enfin, la représentante a suggéré d’associer les populations locales et les chefs traditionnels à la rédaction d’un code pastoral.

M. PABLO SOLÓN-ROMERO (Bolivie) a déclaré qu’il y a 10 ans, son pays s’était opposé à la privatisation de l’eau en modifiant une loi qui allait dans ce sens.  L’an dernier aux Nations Unies, la Bolivie a été co-auteur de la résolution sur l’accès à l’eau et à l’assainissement.  Ce texte, a rappelé le représentant, a été adopté à l’unanimité.  « Il n’y a pas de vie sans eau », a-t-il dit, en s’étonnant du fait que depuis sa création, l’ONU n’ait pas examiné cette question à ce niveau-là.  Cela, a-t-il estimé, est dû au fait que, certains États ont toujours voulu faire de l’eau « une marchandise et une arme de guerre ».

La résolution de 2010 montre le chemin vers lequel la communauté internationale doit, dorénavant, progresser pour garantir les droits de tous, a encore dit M. Solón.  Le droit à l’eau doit devenir une réalité et pour y arriver, la communauté internationale doit trouver les fonds nécessaires pour la préservation de l’eau.  La Bolivie estime qu’il faut créer des mécanismes publics, notamment instaurer un impôt sur les transactions financières.  L’argent qui en proviendra sera reversé dans un fonds créé spécialement à cet effet.  Aucun pouvoir ne doit être donné aux acteurs de l’industrie privée en la matière, a-t-il insisté, en appelant les États Membres et les organisations à débattre de cette question à « Rio+20 ».

M. JUAN PABLO DE LAIGLESIA (Espagne) a rappelé d’emblée que l’accès à l’eau potable et à l’assainissement réduit considérablement les risques de maladies et participe de l’éradication de la pauvreté.  Le progrès atteint pour les OMD en matière d’eau sont mitigés et les partenaires au développement doivent concentrer leur action sur les communautés autochtones, a-t-il estimé, citant en exemple son propre pays, qui a créé un Fonds de coopération pour l’eau et l’assainissement en faveur de l’Amérique latine et des Caraïbes.

M. ESTEBAN PÉREZ, Parlement autochtone de l’Amérique, a rappelé qu’au Venezuela, le droit à l’eau était consacré comme un droit fondamental.  L’État a l’obligation juridique de veiller à sa préservation et des lois garantissent, notamment par le Conseil national des eaux, une consultation préalable avec les communautés autochtones avant tout projet pouvant avoir un impact sur les réserves d’eau.

Mme HERNANDEZ YANEISY ACOSTA (Cuba) a souligné que plus d’un milliard d’enfants sont confrontés à ce jour au manque d’accès à l’eau « qui a été privatisée dans plusieurs États à des fins mercantiles ».  Le problème touche aujourd’hui toutes les populations, mais surtout celles des pays en développement.  Il faut trouver une réponse rapide à cette situation, a insisté la représentante en défendant le droit souverain de chaque État à réguler le droit à l’eau.  L’ONU doit devenir l’instance première au sein de laquelle se discutent et se concluent les décisions majeures sur le droit à l’eau, a-t-elle conclu.

Mme BARBARA SHAW, Caucus mondial des femmes autochtones, a rappelé que l’eau, entité vivante pour tous les peuples, est une richesse sacrée pour les communautés autochtones.  Elle a relevé la relation spirituelle et historique qui lie les femmes autochtones à cette ressource.  Les politiques néolibérales qui promeuvent des projets de développement mercantiles sont des menaces pour les femmes autochtones et pour le bien-être de leurs communautés, a estimé Mme Shaw.  C’est dans ce contexte qu’elle a invité l’Instance permanente à défendre encore plus fermement le droit à l’eau.  Elle a aussi invité les acteurs économiques privés à participer à la protection de cette ressource commune, avant d’appeler la Rapporteure spéciale à mener une étude sur l’eau qui aille au-delà de l’assainissement et qui approfondisse la réflexion sur la relation spirituelle entre les populations autochtones et cette ressource. 

Mme INES MARTINEZ (Équateur) a déclaré que son pays reconnaissait l’eau comme une ressource stratégique, gratuite et accessible à tous, comme le dit la Constitution.  Les peuples autochtones doivent pouvoir bénéficier des richesses de la nature et jouir du droit de maintenir, renforcer et développer leurs modes de vie traditionnels, a plaidé la représentante.

M. KHULOT SUMSHOT, AsiaIndigenous Peoples Caucus, a dénoncé la mainmise de l’économie néolibérale sur l’eau et l’assainissement.  Des millions de peuples autochtones ont vu leur droit fondamental à l’eau bafoué par des barrages sur des rivières près desquelles ces communautés vivaient.  Le représentant a recommandé à l’Instance de conduire une étude sur les incidences de tels projets sur les droits des autochtones à l’eau et d’organiser des réunions auxquelles participeraient les différentes parties prenantes.

M. XAVIER ABREU (Mexique) a estimé important d’examiner la question de l’accès à l’eau dans sa relation avec la vision cosmique qu’en ont les populations autochtones.  Toutes les discussions menées sur le droit à l’eau doivent être engagées avec la participation des populations autochtones, a-t-il insisté, en attirant également l’attention sur le principe du consentement préalable, libre et éclairé.  La question de l’eau doit être inscrite à l’ordre du jour de la Conférence mondiale de 2014 sur les populations autochtones, a conclu le représentant. 

« Personne ne doit être privé d’eau », a insisté M. INTREABUD RICKY TRAN, Caucus mondial des jeunes.  Il a décrit les dégâts causés par l’eau insalubre dans des régions pauvres d’Afrique, notamment.  Il a recommandé qu’en coopération avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), le Fonds volontaire pour les populations autochtones octroie plus de ressources à la promotion de pratiques d’hygiène plus sûres dans les territoires autochtones.  Il a aussi souhaité la tenue d’une réunion dont l’objectif serait d’établir des indicateurs d’accès à l’eau dans les communautés autochtones.  Il a enfin appelé l’Instance à agir pour la cessation des conflits qui ont un impact négatif sur l’accès à l’eau dans les territoires autochtones. 

M. EPHRAIM GOMEZ (Suède) a rappelé que le droit à l’eau était consacré par une résolution de l’Assemblée générale, adoptée le 28 juillet 2010 par 122 voix et 41 abstentions.  Il s’est dit prêt à examiner toutes les mesures qui pourraient permettre à son pays et à d’autres de mettre en œuvre les dispositions de ce texte.

Mme TONYA GONNELLA FRICHNER, Caucus mondial, a rappelé que les articles 23 à 32 de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones soulignent l’importance de stratégies économiques respectueuses des droits traditionnels des peuples autochtones.  Elle a ensuite recommandé à l’Instance d’inscrire le thème de l’eau à l’ordre du jour de la Conférence de 2014 et de tenir une réunion d’experts avec la participation de toutes les parties prenantes afin de définir des indicateurs en matière d’accès à l’eau.

M. PATRICK LOMBAIA, Caucus des peuples autochtones du Pacifique, a soutenu que l’eau était au cœur des progrès traditionnels et des savoirs uniques développés durant des générations dans les communautés autochtones.  Ces communautés entretiennent, d’ailleurs, une relation spirituelle particulière avec cette ressource, a-t-il expliqué.  L’émission de toxiques résultant des activités minières et militaires menées dans les territoires autochtones est un problème qui exige une attention soutenue de tous, a-t-il dit. 

En Australie, l’eau est devenue une marchandise et le Gouvernement y prépare de nouveaux projets de grande envergure sans tenir compte du principe du consentement préalable, libre et éclairé, a par ailleurs fait savoir M. Lombaia, avant de rappeler que les changements climatiques présentaient des risques énormes pour la vie marine des communautés du Pacifique.  L’île de Tuvalu est ainsi menacée de disparition si rien n’est fait, a-t-il prévenu.

Pour Mme MARIA CLEOFÉ SUMIRE DE CONDE, membre du Parlement autochtone d’Amérique, la raréfaction de l’eau douce s’aggrave du fait de l’explosion démographique, de la pollution et de la commercialisation de cette ressource.  L’eau est vitale pour les peuples autochtones, mais elle est aussi notre « sang » car nous avons avec elle une relation spirituelle importante, a dit Mme De Conde.  Les projets actuels envisagés dans notre région doivent d’abord recevoir l’aval des populations autochtones, en vertu du principe du consentement préalable, libre et éclairé, a-t-elle insisté. 

Mme CALEEN SISK-FRANCO, Chef de la tribu Winnemem Wintu, a déclaré que l’eau était un élément central de l’identité culturelle de son peuple.  Elle a donc appelé l’Instance permanente à demander aux États de se doter de législations appropriées et d’établir un code de gestion de l’eau.  La représentante a par ailleurs demandé à ce que des organisations comme la sienne soient consultées au moment de préparer ces lois, soulignant qu’il faut exhorter les États-Unis à mettre pleinement en œuvre la Déclaration de 2007.

M. WILTON LITTLECHILD, SouthernChiefs Organization, a appelé les États à ne pas remettre en cause l’accès à l’eau, ressource primordiale.  Il a lui aussi plaidé en faveur d’un processus de consultations des « Premières Nations », avant de recommander à l’Instance de travailler en étroite coopération avec le Secrétariat de la Commission du développement durable.  Le représentant a enfin demandé que soit menée une étude pour déterminer les incidences négatives des projets de développement sur l’accès des peuples autochtones à l’eau.

M. STEVEN ROSS, Peuples autochtones d’Australie, a dénoncé la commercialisation de l’eau et la multiplication des activités minières dévastatrices, conduites dans son pays, sans respecter le principe du consentement préalable, libre et éclairé.  Ces éléments sont à l’origine de la raréfaction de la ressource dont souffrent ces communautés autochtones « qui entretiennent une relation unique avec l’eau ».  Cette relation justifie, a-t-il fait savoir, la nécessité de les associer aux politiques nationales sur la gestion de l’eau.  Il faut aussi défendre les droits culturels des peuples autochtones à l’eau, a insisté le représentant.

En Australie, a-t-il poursuivi, les communautés autochtones doivent se voir reconnaître un droit total à l’eau.  Il faut pour cela que les entreprises extractives s’engagent dans une discussion avec ces communautés, en tenant compte du principe du consentement préalable, libre et éclairé.  En défendant le droit culturel des peuples autochtones à l’eau, la communauté internationale va inéluctablement faire naître de nouveaux avantages et bénéfices pour les autochtones, a estimé l’orateur.

Mme ANDREA CARMEN, au nom de neuf organisations d’Amérique du Nord et d’Amérique latine, a regretté la multiplication d’activités extractives et la pollution qui a un impact négatif sur l’accès à l’eau des peuples autochtones.  Les politiques publiques optent trop souvent pour la privatisation de l’eau, en dépit des garanties juridiques du droit à l’accès à l’eau reconnu par les textes internationaux, a fustigé Mme Carmen.  Derrière la violation du droit à l’eau, émerge automatiquement la violation du droit à l’éducation, à la santé et à un cadre de vie décente, entre autres, a-t-elle encore dit.  Elle a recommandé à l’Instance permanente d’évaluer et de proposer des mesures adéquates obligeant les États à contrôler et empêcher toutes les démarches des multinationales pouvant avoir une incidence négative sur le bien-être des peuples autochtones.

M. GEOFFREY NETTLETON, IndigenousPeoples’ International Centre for Policy Research and Education, a dénoncé les méfaits de la pollution, qui continuent de se faire ressentir des années après le déversement des déchets, citant notamment les violations de l’industrie minière en Papouasie-Nouvelle-Guinée ou en Indonésie.  Il a rappelé que les ouragans et les typhons de plus en plus nombreux ne faisaient qu’exacerber ces problèmes.  Il a suggéré à l’Instance de préparer une série de recommandations pour l’industrie extractive polluante.

Mme DARLENE SANDERSON, Nihiyaw, Cree, Indigenous Environmental Network, a affirmé qu’il fallait former un réseau multidisciplinaire de connaissances sur l’eau qui intègre les préoccupations et les savoir-faire autochtones.  « On ne tient pas suffisamment compte des enseignements autochtones sur l’eau », a-t-il renchéri à la suite de tant d’autres, avant de souligner l’importance pour les entreprises et les États de respecter le principe du consentement préalable, libre et éclairé.

M. MOHAMED AL KURSHAN, Comité coopératif de Palestine, a décrit les nombreuses violations faites aux éleveurs bédouins palestiniens par les Forces de sécurité israéliennes.  La situation économique et sociale de ces populations est devenue intenable pour ces communautés qui se voient refuser l’accès aux terres arables et aux ressources en eau, a-t-il souligné.  Les Bédouins locaux, a encore dit le représentant, se voient obliger d’acheter de l’eau et empêcher de mener leurs troupeaux dans les zones où ils peuvent en trouver.  Comment peut-on vivre en paix dans de telles circonstances? s’est-il demandé.

M. TONY JAMES, Association amérindienne de Guyana, a, à son tour, dénoncé la privatisation de l’eau, et rappelé que le mercure découlant de l’exploitation de certaines mines dans son pays, a des répercussions préoccupantes sur l’environnement.  On doit craindre l’irruption d’une grave catastrophe sanitaire, a-t-il prévenu.  En dépit des droits autochtones proclamés et reconnus par le pays, aucune application pratique n’est visible, a estimé M. James.  Il a, de ce fait, appelé l’Instance permanente à pousser les États à aller vers une meilleure application de la Déclaration de 2007.  L’ONU et les institutions financières internationales doivent également accélérer leur processus de coopération en faveur des autochtones, a-t-il ajouté.

M. EDWARD JOHN, membre de l’Instance permanente, a attiré l’attention sur l’article 25 de la Déclaration de 2007, qui stipule que « les peuples autochtones ont le droit de conserver et de renforcer leurs liens spirituels particuliers avec les terres, territoires, eaux et zones maritimes côtières et autres ressources qu’ils possèdent ou occupent et utilisent traditionnellement, et d’assumer leurs responsabilités en la matière à l’égard des générations futures ».

En guise de conclusion, Mme CATARINA DE ALBUQURQUE, Rapporteure spéciale sur les droits de l’homme relatifs à l’accès à l’eau et à l’assainissement, a estimé que les mécanismes pour faire respecter le droit à l’eau des peuples autochtones existaient, mais que seule la volonté politique faisait parfois défaut.

En remarques finales, M. PEDRO CALDERÓN ROSAS (Bolivie) a expliqué que les expériences de ces dernières années en Bolivie, ont mis fin à la démocratie participative qui caractérisait le pays.  Il a révélé que des compagnies américaines et françaises avaient, en effet, obtenu des droits d’exploitation des ressources sur certains territoires autochtones.  Depuis le début de ces exploitations, les peuples autochtones, n’ont plus la « mainmise sur leurs ressources », a-t-il regretté.  Le droit des entreprises agricoles à disposer de l’eau prime aujourd’hui.  Cela est « inacceptable », a-t-il dit.  Durant la guerre de l’eau en 2000, a rappelé M. Calderón, la population bolivienne avait souhaité et obtenu du Gouvernement de l’époque le rejet du projet de la loi sur l’eau.  Cette guerre a également été à l’origine de l’émergence d’un réseau associatif dynamique en Bolivie, s’est-il félicité, en conclusion.

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